Archives de catégorie : Questions

Comment faire le diagnostic de TDA/H ?

Un diagnostic clinique

On pense parfois qu’il faut faire énormément de démarches et voir plusieurs professionnels pour obtenir le diagnostic de Trouble du Déficit de l’Attention avec/sans Hyperactivité, alors que ce n’est pas le cas.

Tout d’abord, le diagnostic de TDA/H est un diagnostic clinique et médical, ce qui signifie que seul un spécialiste (médecin psychiatre, pédiatre, neuropédiatre, neurologue, neuropsychologue, psychologue clinicien) peut faire le diagnostic.

Ce diagnostic dépend bien sûr des informations que le professionnel obtient de l’enfant, de l’adolescent, ou de l’adulte qu’il reçoit. Mais certains professionnels sont parfois induit en erreur par leur formation théorique spécifique et/ou leur manque d’expérience du TDAH.
Je dirais donc qu’il faut une certaine expérience de la part du professionnel pour « aller chercher » ces informations, mais aussi pour les interpréter.

Notons en tous cas une information importante : le diagnostic du TDA/H est un diagnostic « psychiatrique » classique sur des critères cliniques, et normalement il n’y a pas d’examen neuropsychologique spécifique à faire passer (tel qu’un bilan avec des tests de mesure), sauf s’il y a des besoins spécifiques, ou des hypothèses de comorbidité. Une comorbidité pourrait être, par exemple, d’origine neurodéveloppementale, comme un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Les tests neuropsychologiques peuvent permettre d’évaluer le fonctionnement de telle ou telle dimension du trouble (par exemple la capacité mémorielle), mais cela restera un complément d’information.

Pourquoi le diagnostic est-il compliqué à faire ?

Ce qui rend le diagnostic difficile est que la nature même du TDA/H, qui est un trouble neurodéveloppemental, est souvent mal comprise, par manque de formation des professionnels, et que les critères objectifs du TDA/H sont parfois assez flous pour eux.
Sachant qu’un comportement peut avoir plusieurs origines, il peut donc arriver que des observations faites par un clinicien mènent à une conclusion erronée. C’est pour cela qu’il est recommandé aux cliniciens d’utiliser des échelles standardisées, qui vont permettre de sérieusement consolider ses hypothèses diagnostiques. Chez l’adulte, il y a trois échelles qui me paraissent essentielles : ASRS 1.1 (pour le dépistage du TDA/H), DIVA 5.0 (pour étayer le diagnostic), mais aussi la WURS-61 ou WURS-25, auxquelles on peut ajouter, par exemple, les critères d’Hallowell et Ratey (1994), ou l’Inventaire des symptômes du TDAH de la CADDRA (Canadian ADHD Resource Alliance). On pourra également utiliser le très bon formulaire CADDRA d’évaluation du TDAH (11 pages).

Comprendre le fonctionnement du trouble

La nature neurobiologique du trouble doit être bien comprise, et il faut pouvoir également rattacher ces comportements à un fonctionnement général de l’individu. Donc, au delà de remplir des cases de critère diagnostic (même si cela reste indispensable), il faut également pour ne pas se tromper (et donc éviter de faire du sur-diagnostic ou du sous-diagnostic), faire une « quasi-enquête de police » pour tenter d’aller chercher l’origine ou l’explication des comportements.

Par exemple, si on ne comprend pas le fonctionnement neurobiologique du TDA/H (par exemple la question du « verrou dopaminergique »), il devient difficile d’associer un comportement à l’origine neurobiologique du TDA/H ! Le professionnel peut certes observer un comportement, mais il risque de ne pas voir que ce comportement est dû au TDA/H, et il risque de l’expliquer autrement, parce qu’un comportement peut avoir de très nombreuses origines différentes !

Par exemple : un patient jeune adulte, auquel j’avais déjà fait passer des échelles (ASRS et WURS), et pour lequel j’avais une forte suspicion de TDA/H, me rapporte qu’il a fumé pendant longtemps, et depuis deux ans il est passé à la cigarette électronique. Jusque-là, rien de bien intéressant en apparence. Toutefois, il est connu scientifiquement qu’il existe une probabilité élevée de comorbidité addictive dans le TDA/H, je lui pose donc quelques questions exploratoires supplémentaires :

1 – Les circonstances dans lesquelles il fume en général.
2 – S’il a déjà essayé de fumer autre chose que du tabac.
3 – Comment s’est passée pour lui la transition entre la cigarette « classique » et la cigarette électronique.

Concernant les circonstances dans lesquelles il fume, il me rapporte qu’il fume beaucoup en travaillant, parce que cela l’aide à être concentré, et que cela l’aide à mobiliser ses ressources pour aboutir à des conclusions. Il n’y a pas besoin d’être sorcier pour voir là l’effet de la nicotine, encore faut-il aussi faire le lien entre nicotine et dopamine qui est que la nicotine augmente le taux de dopamine dans la fente synaptique (espace de transmission chimique entre les extrémités dendritiques des neurones) ! Mais cela est valable pour n’importe qui, et pas seulement des personnes atteintes du TDA/H..

Concernant d’autres « drogues », il m’explique avoir essayé le cannabis, mais il a vite arrêté, parce que même si ça le stimulait au début, le cannabis le mettait ensuite dans un état « mou et confus » qui l’empêchait de pouvoir se focaliser sur une idée. Là encore, pas de conclusion possible, si ce n’est que le patient n’aimait pas perdre le contrôle de sa pensée.

Troisième question : Comment s’est passée la transition entre la cigarette classique et la cigarette électronique ? Là, il m’explique que pendant 6 mois, il a arrêté totalement de fumer, et que cela a généré chez lui divers symptômes : forte agitation et fébrilité interne, difficulté à canaliser ses pensées, besoin d’aller se défouler à un tel point qu’il lui fallait fréquemment sortir de chez lui pour aller courir, et forte augmentation de sa libido, devenue « démesurée, ce qui devenait problématique en société« . Il a donc commencé à prendre des chewing-gums à la nicotine, et là les problèmes se sont résorbés partiellement, puis complètement par la suite avec le démarrage de la cigarette électronique.

On observe dans cette vignette que lors de l’arrêt de la nicotine, des symptômes proches de la dimension impulsivité sont soudain apparus de façon forte. Quand à la libido, sans être un spécialiste, celle-ci est aussi fortement influencée par les questions dopaminergiques. Le manque de dopamine de ce patient, qui est particulièrement problématique dans le TDA/H, était donc comblé partiellement par la compensation nicotinique.

Le patient me parle ensuite de la cigarette comme d’un « jalon », un marqueur du temps, qui lui permettait de rythmer sa pensée, mais aussi de la concrétiser en lui facilitant les prises de décisions dans son travail professionnel.

Diminuer le risque d’erreur diagnostique

Interroger uniquement le patient est insuffisant : il faut, avec l’accord du patient, essayer d’avoir les observations et ressentis de l’entourage et essayer de croiser les informations pour diminuer le risque d’erreur diagnostique. Il est donc important de multiplier les sources d’information :
1) Demander au patient de passer les échelles conjointement avec ses parents.
2) Si possible, rencontrer les proches : le conjoint, les parents, parfois les enfants (si le patient est adulte et âgé et qu’il a des enfants en âge d’expliquer les choses), ou d’autres proches du patient qui le connaissent depuis très longtemps.
3) récupérer des données écrites : notamment des bulletins scolaires (que le patient soit petit ou grand), ou bien, pour un petit enfant, récupérer des courriers de la maîtresse, par exemple.

Conclusion

En conclusion, il faut essayer de croiser toutes les informations possibles pour :
1) s’assurer que tous les critères diagnostics purement comportementaux et émotionnels sont présents.
2) s’assurer que l’on peut attribuer ces comportements au fonctionnement du TDA/H
3) s’assurer que l’entourage de ce patient nous donne des éléments qui « collent » avec le fonctionnement du patient depuis très longtemps (et non pas depuis 15 jours, lorsqu’un événement particulier est arrivé dans sa vie, par exemple).

Première version : octobre 2020 – Mise à jour : 18 décembre 2022

SOURCE : Vidéo Youtube « Comment se fait le diagnostic de TDAH ? » , par le Docteur Jean-Baptiste Alexanian

Confidentialité et protection psychologique de l’enfant

Le psychologue qui reçoit un enfant a le devoir de garder la confidentialité de ce que l’enfant lui a dit, de manière à permettre une certaine protection psychologique de l’enfant face aux adultes. C’est ce qu’on appelle le secret professionnel.

Le secret professionnel contribue à instaurer dans le temps, la confiance des parents, des enfants et des adolescents envers le professionnel et à favoriser ainsi les conditions d’une concertation.

Si le psychologue estime nécessaire de communiquer aux parents des informations que lui a communiqué l’enfant, il devra d’abord demander son accord à l’enfant.

Par ailleurs, dans le cadre de la loi sur le partage d’information entre professionnels, il peut échanger des informations avec d’autres professionnels compétents, cela dans l’intérêt de l’enfant. Ce partage d’informations doit s’effectuer dans des conditions strictes. La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance aménage le secret professionnel pour
permettre à ces professionnels d’échanger entre eux les informations nécessaires à l’évaluation
d’une situation, et à la mise en œuvre des actions de protection

La Cellule de Recueil des Informations préoccupantes.

Dans les circonstances particulières où les faits communiqués par l’enfant sont perçus par le psychologue comme étant de l’ordre d’une forme de maltraitance psychologique ou physique, ou lorsque des abus sont constatés, le psychologue peut émettre par écrit une information préoccupante à la C.R.I.P. (Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes).
Cette procédure est correspond au signalement de la situation à un cellule chargée dans un premier temps de conseiller le professionnel pour lui permettre de prendre les mesures qui s’imposent en matière de protection de l’enfant.

Les cellules de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes (CRIP) recueillent et centralisent toutes les transmissions de situations d’enfant en danger ou en risque de l’être. Elles conseillent les professionnels et les particuliers qui se questionnent autour d’une situation d’un enfant.

Dans chaque cellule, une équipe pluridisciplinaire évalue la situation et décide des orientations (administratives ou judiciaires) les plus appropriées. En cas de danger, la cellule peut transmettre les informations sur un enfant directement au Parquet.

La consultation psychologique en ligne

Consulter un psychologue en ligne : une fausse « bonne idée » ?

Comment penser la consultation psychologique en ligne (et à distance), c’est-à-dire une consultation qui se fait en communiquant via internet, entre une personne (un patient) et un psychologue, et qui au lieu de se placer dans un lieu réel, transpose cette rencontre au sein d’un lieu virtuel, en utilisant des images représentatives de l’autre distant, au travers d’écrans et haut-parleurs interposés ?

Cette question est particulièrement d’actualité, au moment où fleurissent sur internet toutes sortes de propositions de consultations psychothérapiques en ligne et à distance, permises par les technologies actuelles (webcam, skype, visioconférence, etc.). C’est pourquoi il nous parait bénéfique de tenter de nous y plonger aujourd’hui.

Pour commencer, nous reviendrons au travail du psychologue, et à ce que ce travail, pour être fait, nécessite. Puis, comme cette question nécessite de repenser le lien, nous aborderons le lien et la qualité du lien, puis l’image de soi face à l’autre et la confiance en l’autre au moment de s’exposer au lien. Enfin, nous aborderons la fonction de pare-excitation du cadre psychologique.

Le travail du psychologue

Le psychologue est formé à l’écoute, et c’est sa principale qualité reconnue, mais il est aussi formé à l’observation, et à l’analyse de ce qu’il observe. Car le lien à autrui ne se fait pas seulement au travers d’une parole véhiculant une information ; il se fait au travers d’une transmission complexe et à double sens incluant l’échange de parole, mais aussi toute la palette du comportement. Cette dimension comportementale de la communication nécessite pour être déchiffrée toute une capacité interprétative, que tout un chacun apprend à utiliser dès l’enfance (à moins de souffrir d’un trouble particulier, comme l’autisme par exemple).

Ainsi, au sein de la relation, toute parole est « placée » et fait partie d’un ensemble comportemental qui a du sens, et il appartient au psychologue de pouvoir le décrypter pour s’en servir dans le strict cadre thérapeutique. C’est d’ailleurs aussi pour définir et améliorer ce cadre qu’a été mise en place la déontologie.

« La formation et l’éthique du psychologue sont en principe une garantie contre le jugement moral. Bien au contraire, un psychologue est en place de tout entendre chez son patient. » (Dominique Cuny, psychologue clinicien et psychanalyste)

La qualité du lien « en présence »

Le lien « en présence » est le lien le plus riche qui existe avec quelqu’un, et c’est un lien naturel chez les mammifères qui sont des animaux sociaux. Bien que les nouvelles technologies arrivent de façon relativement satisfaisante à recréer ce lien par leur capacité à capturer puis véhiculer et restituer l’image et le son, leur utilisation induit des biais, qui sont des obstacles supplémentaires potentiels à la relation.

Comme la qualité du lien est presque toujours fragilisée chez une personne qui ne va pas bien, il parait d’autant plus important de ne pas induire d’obstacle pouvant nuire au lien qui se met en place dans le cadre d’une relation thérapeutique !

L’image de soi et la peur d’être jugé.

Il y a quelque chose de naturel et inhérent à toute relation que de se placer en position de pouvoir éventuellement être remis en question par l’autre. Ce qui pose problème, c’est lorsque ce « potentiel déstabilisateur » que possède la relation devient pour soi un obstacle infranchissable ; il y a là ce qu’on peut appeler un symptôme. On retrouve cette question par exemple dans la timidité classique, voire dans l’inhibition de la timidité excessive, mais aussi dans beaucoup de problématiques psychologiques où l’image de soi est fragilisée, et où une certaine « honte de se présenter comme anormal » est présente.

« L’autre, cet inconnu » ; un agresseur potentiel pour la personne vulnérable

Lorsqu’on est fragile, en général, on est d’autant plus obligé de faire attention à l’autre, parce que l’autre, s’il est inconnu, est un agresseur potentiel, et qu’il faut pouvoir s’en protéger le cas échéant.

Dans cette logique de vulnérabilité, une généralisation que l’on peut avoir a tendance à faire serait de considérer que toute nouvelle relation doit se voir appliquer ces précautions. On mésestime ainsi le contexte dans lequel on se place, alors que celui-ci revêt une importance non négligeable. Ainsi, par exemple, le fait d’aller voir un psychologue et de se soumettre à son jugement est parfois générateur d’une forte crainte, voire dans certains cas terrorisant, alors que si l’on tient compte du contexte, c’est-à-dire du fait que le psychologue est un professionnel de la relation et qu’il est là pour nous aider sans nous juger, alors cela devrait nous permettre de relativiser.

En fait, toute relation contient un « potentiel d’exposition« , auquel les personnes bien portantes acceptent de se soumettre, parce qu’elles prennent en compte la faible probabilité pour que l’autre « étranger » se transforme en ennemi. Elles acceptent donc de prendre un léger risque.

« Interrogez-vous sur ce qu’il y a chez vous derrière cette peur d’être jugée. Une consultation en ligne ne fera que reporter à plus tard votre problème en le masquant. Rien ne vaut la parole dans le réel du rapport avec le thérapeute , ça s’appelle « le transfert » et c’est ce qui est curatif sur le symptôme. » (Dominique Cuny, psychologue clinicien et psychanalyste)

Lorsque le présentiel permet d’évoluer vers la confiance en soi.

Lors de séances de psychodrame, par exemple, les patients sont confrontés au regard des autres, et le fait de venir se placer dans cette situation thérapeutique de façon régulière, est une véritable épreuve pour certains patients.

Cependant, c’est cette sorte de « mini-épreuve », vécue et répétée du lien proximal « en présence », qui va permettre au patient de se reconstituer petit-à-petit une capacité à se présenter au regard d’autrui sans en ressentir de crainte, à condition bien sûr qu’il se retrouve dans un groupe bienveillant et en lequel il puisse avoir confiance. C’est d’ailleurs pour ça qu’une des règles énoncées à un patient lors de l’arrivée dans un groupe de psychodrame est la bienveillance vis-à-vis des autres participants.

La bienveillance en consultation

Si nous revenons à la situation classique du patient qui souhaite, pour la première fois, consulter un psychologue ; la règle de la bienveillance, ici, n’est pas énoncée comme telle, mais en fait elle préexiste car elle est signifiée dans la déontologie des psychologues, sous la forme :

« Article 2 : La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. »

C’est pourquoi, en s’appuyant sur cette déontologie, le patient doit pouvoir faire confiance au psychologue. Par ailleurs, la déontologie ajoute un article protecteur particulièrement explicite :

Article 15 : Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation économique, affective ou sexuelle d’autrui.« 

La fonction pare-excitations du cadre psychologique

Le pédiatre et psychanalyste D. W. Winnicott a mis en avant l’importance de la fonction de « holding » de la mère pour son enfant, c’est-à-dire le fait de le tenir et de le contenir lors des soins et bercements qu’elle lui prodigue. Cette fonction joue un rôle de pare-excitations, c’est-à-dire que le holding permet de tempérer des excitations dont l’intensité trop importante dépasserait les capacités de l’enfant d’y faire face. C’est ainsi la mère qui sert de pare-excitation au bébé jusqu’à ce que le Moi en croissance de celui-ci trouve sur sa propre peau un étayage suffisant pour assumer cette fonction.

Cette adaptation de la mère qui étaye son enfant peut-être reprise comme une métaphore du cadre psychologique, dans lequel la bienveillance du psychologue jouerait  un rôle équivalent aux soins positifs prodigués par la mère.

En gardant comme référence cette métaphore, on peut aussi évoquer la question de la proximité entre le psychologue et le patient, en miroir d’une proximité de la mère par rapport à son enfant. Comment, en effet, constituer un cadre physique et contextuel qui permette l’émergence d’une parole, la plus détachée possible d’une réalité contextuelle dans laquelle se trouve le patient ? Ne doit-on pas ici se poser cette question lorsque le patient est à son domicile ou dans un cybercafé, et parle au psychologue au travers d’une webcam ?

On pourrait penser que la consultation dans un lieu neutre est plus à même de placer le patient hors de sa réalité contextuelle et de tout ce que son contexte peut représenter d’excitant au plan inconscient, comme la relative présence familiale (ou au contraire le ressenti d’isolement, comme on le constate parfois).

Par ailleurs, le déplacement réel, non content d’offrir la possibilité d’accéder à un espace indépendant, place aussi le patient dans un mouvement réel qui le confronte à une réalité extérieure (frustrante), ce qui peut aussi l’aider à se placer, au plan interne, dans une phase de mouvement à la fois économique et symbolique. Enfin, en sortant de chez lui, le sujet passe une frontière ; il passe de l’interne à l’externe, et cela est aussi hautement symbolique…

Aussi me semble t-il qu’il ne faut pas trop minimiser l’importance que revêtent ces interprétations psychanalytiques.

Rédaction : Tanguy Bodin-Hullin (4 mars 2015)

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Harcèlement moral au travail : s’en sortir

Se sortir d’un harcèlement moral au travail

Le harcèlement moral au travail est constitué par un ensemble d’actions plus ou moins directes qui sont mises en place par une personne (le harceleur) ou par un groupe de personnes (harceleuses à des degrés différents), de façon à déstabiliser progressivement et fragiliser une seconde personne (la victime).

L’objectif visé par le harceleur ou le groupe harceleur est multiple :

  1. Contrôler la situation en imposant ses vues de façon directe ou indirecte (par exemple par la séduction et la manipulation).
  2. Obtenir la soumission consentie de la victime face à des idées ou consignes qu’on tente de lui imposer. Cette imposition, qui peut-être plus ou moins visible pour la victime, se révèle souvent lors de l’apparition subite, inattendue d’une consigne arbitraire.
  3. Mettre (progressivement) la victime à l’écart de tout pouvoir de décision réel.
  4. Si cette personne est trop gênante pour le (groupe) harceleur, par exemple si elle tente de s’opposer ou de s’émanciper des tentatives de contrôle mises en place, se « débarrasser » d’elle en obtenant finalement d’elle qu’elle quitte le poste qu’elle occupe.

Pour atteindre ces objectifs, la tactique mise en place est une fragilisation progressive de la personne. Cela se fait au travers de différents moyens, mais tous auront comme effet d’atteindre puis de rompre l’équilibre psychique et le dynamisme interne de la personne, on peut donc les qualifier « d’attaques« .

Ces attaques peuvent être de tous ordres et sont plus ou moins directes, parfois extrêmement sournoises et cachées, ce qui les rend parfois indétectables pour la victime, qui ne comprend pas ce qui lui arrive, d’autant qu’elles sont étalées dans le temps.

  • Les attaques d’ordre matériel – plus visibles – vont par exemple avoir un impact sur le salaire, et sur les conditions de travail de la personne, qui va s’en inquiéter à juste titre.
  • Certaines attaques ont pour but d’affaiblir le relationnel et la réputation de la personne, elles impactent le degré de culpabilité et le positionnement interne de la personne pour elle-même et face aux autres.
  • Les attaques les plus directes visent l’estime de soi, en rabaissant la victime et en tentant de jouer sur sa culpabilité et sa fragilité.
  • Enfin,  tout cela engendre un stress considérable et une angoisse interne importante.

Nuage de mots harcèlement moral au travail

Nuage de mots sur le harcèlement moral au travail

Le harcèlement moral est puni par la loi, et le Code du Travail indique :

« Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel« . (Article L1152-1 du Code du Travail)

Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. (Article L1152-2 du Code du Travail)

Les dommages

Cependant, dans les faits, la victime d’un harcèlement moral qui a dépassé quelques mois est souvent considérablement affaiblie à plusieurs niveaux : santé psychique, dommages financiers conséquents, et dommages relationnels directs et collatéraux. C’est donc un véritable raz-de-marée que subit la personne, et qui dépasse le cadre du travail, parce que cela impacte aussi la vie privée.

Les symptômes psychologique du harcèlement

Nuage de mots symptomes du harcelement moral

Symptômes du harcèlement moral

Au plan des symptômes psychologiques, on constate principalement :

  • un stress important (celui-ci est mesurable avec des tests)
  • des troubles du sommeil
  • des troubles de l’alimentation
  • des ruminations importantes (questionnements et réflexions incessantes)
  • de la peur et de l’angoisse face aux diverses situations de travail
  • une augmentation de la conflictualité avec les proches
  • une haine difficile à contrôler qui se traduit par des pensées hétéro-agressives (idées de vengeance) qui dans certains cas se traduisent en actes. Le harcèlement pousse à la faute.
  • une perte de la libido sexuelle
  • une estime de soi dégradée
  • une démotivation globale
  • une perte d’envie de vivre (anhédonie) et un sentiment complexe de blocage personnel ou de dépossession de soi qui mènent à des pensées ou idées suicidaires, sachant que le risque de passage à l’acte est réel.
  • une grande difficulté à reprendre pied, à retrouver un équilibre et le goût de vivre face à tout cela.

La difficulté de qualifier les faits

Les faits de harcèlement sont souvent très difficiles à prouver :

1) parce qu’ils s’étalent dans le temps. Parfois sur plusieurs années.

2) parce que la personne harceleuse (homme ou femme) a le plus souvent donné des versions éludées, inexactes et mensongères des faits auprès des personnes tierces qui auraient pu avoir un impact sur le harcèlement.

3) parce que la personne harceleuse évite de laisser des traces écrites, et utilise beaucoup l’oral pour arriver à ses fins. Dans sa hardiesse, le harceleur a parfois fourni des éléments écrits à des personnes tierces mélangeant le vrai et le faux, et éludant la vérité des faits, de façon à attaquer la personne visée (sa victime) de façon sournoise.

4) parce que la personne harceleuse peut avoir « utilisé » de façon cachée des personnes tierces qui lui ont « rendu service » et lui ont ainsi permis d’agir sans prendre de risques. Il peut ainsi distiller de la responsabilité auprès de personnes tierces, qui de ce fait, sont aussi porteuses d’une certaine manière du harcèlement moral. Ces personnes, par la suite, ne pourront pas se positionner clairement du côté du harcelé, parce qu’elles auront d’une certaine manière été complices de façon involontaire. Cela est souvent invisible pour la victime, qui a ainsi été discréditée fortement sans même le savoir. Les autres personnes, prises par le doute, ne l’aideront pas et tiendront le silence.

Se battre en justice : à conseiller ?

Il est particulièrement difficile pour une victime de harcèlement d’utiliser la loi pour se protéger, et ce d’ailleurs même dans les cas de harcèlement moral qui ne sont pas en relation avec le monde professionnel. Selon Christelle Mazza, avocate spécialisée en droit administratif, et qui a écrit un livre sur le harcèlement moral dans la fonction publique, un  procès pour harcèlement moral coûte en moyenne plus de 4000 € et dure toujours de long mois, parfois même plusieurs années, sans que la victime soit complètement assurée d’obtenir gain de cause, ou tout du moins pour une victoire bien maigre au vu des dommages causés.

Aller en justice est un effort très difficile à faire, parce qu’il faut pouvoir supporter la vérification et la contradiction qui seront probablement de la partie, sans compter les cas où l’auteur principale du harcèlement est pathologiquement pervers. Dans ces cas, en effet, le harceleur pervers mettra tout en oeuvre, y compris bien sûr le témoignage mensonger, pour tenter de dévoyer le processus juridique qui consiste à mettre à nu les faits réels, leurs causes, et leurs conséquences. Par ailleurs, le travail de reprise des faits est rendu d’autant plus difficile que la victime a été fragilisée, avec des troubles de la pensée et souvent une extrême susceptibilité due à la souffrance subie.

Si, après la délicate tâche de trouver un avocat suffisamment compétent, la victime finit par aller en justice, le jugement permet au moins de faire entendre – à posteriori – quelque chose au sein du cadre professionnel de la victime, où le non-dit est bien souvent très présent, et à condition que tout ne se passe pas en huis clos, c’est-à-dire à condition qu’un certain nombre d’acteurs du travail soient présents au jugement.

Cependant, du côté de la victime, on constate que celle-ci, dévastée au plan psychologique, n’y trouve pas toujours son « compte ». Car même si le procès est gagné, l’argent ne comble pas certaines souffrances personnelles, et le manque de reconnaissance peut persister. L’argent n’est pas synonyme d’un apaisement complet de la souffrance psychologique subie pendant longtemps, et souvent encore à venir, le temps que la victime se reconstruise au plan professionnel, ce qui nécessite parallèlement une reconstruction personnelle.

L’aide que peut apporter le psychologue

Ainsi, en plus de ces difficultés pour se protéger inhérentes à la lourdeur du processus judiciaire, il est fondamental de se protéger psychiquement de ce que l’on traverse, en le « mettant au travail ».

Voir un psychologue est un acte relativement facile à mettre en œuvre et qui permet à la personne victime d’être soutenue. Le cadre bienveillant doit lui permettre non seulement de se sentir enfin écoutée et comprise, mais aussi de préserver la confidentialité et une certaine neutralité nécessaires à sa protection. Pour cela, le psychologue clinicien dispose non seulement des moyens de reconnaissance des symptômes psychologiques et d’analyse de leurs causes, mais aussi de techniques de soutien psychothérapiques en vue de recouvrer une stabilité psychique et émotionnelle, permettant de réduire progressivement la souffrance de la personne.

« Je suis victime de harcèlement moral, quel serait votre conseil ? »

Il est très fortement recommandé, dans ce genre de situation, de vous faire aider psychologiquement, afin de pouvoir « évacuer » les causes de votre souffrance, et retrouver petit-à-petit l’énergie de vie dont vous avez été dépossédé par cette situation, ce qui vous permettra ensuite de prendre les meilleures dispositions pour vous sortir de cette situation avec le minimum de dommages personnels possibles. Avec ce gain d’énergie, le travail consistera ensuite à réorienter votre vie vers un chemin qui soit plus positif et qui permette un nouvel épanouissement.

Ce suivi personnel sera en général étalé dans le temps sur plusieurs séances, et adapté en fonction des difficultés que vous rencontrez.

Par ailleurs, il est essentiel de renouer le contact avec vos véritables amis (celles et ceux qui n’ont pas été impliqués et qui ne sont pas en lien positif avec la personne harceleuse) et tenter de rompre le voile du silence qui parfois s’est installé petit-à-petit. Faire des activités avec vos amis, ou avec des personnes d’un autre environnement permet de penser – au moins momentanément – à autre chose, et permet de ne pas se laisser emporter par un flot de souffrance personnelle qui se révèle destructeur et infertile. Reprendre petit-à-petit goût à la vie est vraiment essentiel pour survivre à toute cette souffrance.

Rédaction : Tanguy Bodin-Hullin, psychologue clinicien. Mise à jour Novembre 2014, Tous droits réservés.

 Liens utiles :

  • Site Associations Libres : témoignages et outils permettant se renseigner sur le harcèlement moral et les pervers narcissiques.

Pourquoi aller voir un « psy » ?

Peut-être vivez-vous en ce moment ou depuis un certain temps des difficultés personnelles, et vous avez commencé à vous mettre à la recherche d’un « psy », un professionnel de l’écoute et de la relation, pour vous permettre de vous sortir de l’ornière dans laquelle vous avez l’impression d’être.

Voici quelques bonnes raisons pour lesquelles consulter un psychologue :

  • vous pensez beaucoup et vous n’êtes pas serein(e)
  • vous dormez mal et/ou avez du mal à vous endormir
  • vous faites des cauchemars
  • vous vous sentez fréquemment fatigué(e), vous n’avez plus trop d’énergie
  • vous êtes angoissé(e), ou anxieux(se)
  • vous avez vécu une situation violente qui vous a marqué
  • vous souffrez de la perte de quelqu’un
  • vous êtes stressé(e) dans votre vie actuelle
  • vous vivez des difficultés au travail qui augmentent votre stress
  • vous avez des problèmes dans votre couple
  • vous vivez en situation de conflit avec certaines personnes de votre entourage
  • vous avez l’impression d’avoir été manipulé(e) et vous en souffrez
  • vous vous sentez seul(e), vous êtes isolé(e)
  • vous sentez que vous avez perdu le plaisir de vivre
  • vous avez des peurs peu rationnelles
  • vous vous sentez assiégé(e)
  • vous ressentez un mal-être général, un marasme
  • vous ne vous sentez pas à votre place
  • vous ne supportez pas le regard des autres
  • certaines situations « normales » vous posent problème, comme parler au téléphone
  • vous pensez que vous n’allez pas bien mais vous n’arrivez pas à demander de l’aide
  • un médecin ou un psychiatre vous a prescrit des médicaments psychotropes mais sans aucune proposition de psychothérapie !
  • vous avez des difficultés avec l’alcool ou les drogues
  • vous êtes très dépendant d’une personne en particulier et cela vous pose problème
  • vous avez du mal à passer à l’action pour résoudre vos problèmes

Une seule de ces raisons est suffisante pour aller consulter…

Pourquoi irais-je consulter ?

Voir un psychologue va vous permettre de prendre un peu de temps dédié à vous-même, pour vous poser en confiance, parler de vos difficultés, et ainsi, petit-à-petit, trouver une voie personnelle afin de retrouver un mieux-être.

Vous ne voyez peut-être pas trop d’issue pour le moment, mais vous verrez que cela peut se faire, oui, et surtout avec vos mots à vous.

Nuage de mots symptôme

Nuage de mots qui correspondent à des symptômes

Les différents professionnels du psychisme

Professionnels de santé mentale : quel « psy » choisir ?

Le vocable « psy » est un peu trompeur. Il y a en effet beaucoup de noms qu’on entend et qui s’appliquent aux professionnels en lien avec la santé mentale : psychothérapeute, psychiatre, psychologue, psychanalyste. Cela induit parfois une certaine confusion, parce qu’en fait, tout le monde n’a pas la même formation ni les mêmes compétences, et il est utile de s’informer avant d’aller consulter quelqu’un.

Le médecin psychiatre

Parmi les professionnels de la santé mentale, le psychiatre est un médecin qui a effectué 10 ans d’études dont six années de médecine suivies de quatre années de spécialisation en santé mentale (psychiatrie). Il délivre des soins par une approche médicamenteuse et/ou psychothérapeutique, ce qui veut dire que dans certains cas les psychiatres s’y connaissent très peu en psychothérapie et n’ont pas cette démarche. Pour ceux qui délivrent des soins dans le cadre d’interventions psychothérapiques, ils peuvent utiliser diverses techniques. Par exemple : psychanalyse, thérapies de groupe, de couple, de famille, thérapies cognitivo-comportementales, méthodes de relaxation, etc. Parmi les professionnels de santé mentale, le psychiatre est le seul habilité à prescrire des médicaments, notamment des médicaments psychotropes. Il n’a toutefois pas du tout la même formation que les psychologues, qui ont une formation de sciences humaines.

Les psychologues

Les psychologues ne sont pas des médecins, mais ils sont eux aussi très reconnus car diplômés d’une Université de Sciences Humaines ou d’une école habilitée par l’Etat, (l’Ecole de Psychologues Praticiens par exemple). Ils peuvent avoir des spécialités différentes, selon leur formation :

  • le psychologue du travail  : souvent au sein de l’entreprise, il est spécialisé dans l’étude des comportements liés au monde professionnel. Il peut par exemple accompagner des personnes qui rencontrent des difficultés dans le cadre du monde professionnel ; conflits, fatigue, burnout / burn-out (épuisement émotionnel au travail). Il peut aussi accompagner les personnes dans leurs démarches de recherche d’emploi (la reconversion, la formation, etc.) et participer au travail de gestion des ressources humaines.
  • le psychologue scolaire : au sein d’une ou plusieurs écoles, il est spécialisé dans l’aide aux enfants qui rencontrent des difficultés psychologiques dans leur vie scolaire, et il travaille en partenariat avec les enseignants. Sa formation est de quatre ans et correspond à un Master 1, mais elle inclut un stage long au sein d’une classe pendant un an.
  • le neuropsychologue : c’est un psychologue spécialisé dans les troubles cognitifs ; il est habilité à faire passer certains tests qui permettent d’identifier et d’orienter une personne.
  • le psychologue du développement : c’est un psychologue spécialisé dans le développement de la personne, il travaille souvent dans un cadre de recherche.
  • le psychologue social : c’est un psychologue spécialisé sur les comportements des individus au sein de groupes. Souvent chercheur, il peut être aussi intervenant dans certains cadres où des conflits apparaissent : entreprises, institutions, écoles.
  • enfin, le psychologue clinicien : (voir paragraphe ci-après)

Un psychologue qui s’occupe du bien-être psychique : le psychologue clinicien

Le psychologue clinicien possède une formation orientée sur le soin psychique à la personne. Il est diplômé d’un DESS ou d’un Master 2 professionnel obtenu après cinq ans de formation théorique dans une université de Sciences Humaines et possède une formation pointue en psychopathologie et en psychanalyse, augmentée d’une expérience acquise aux cours de stages en institutions spécialisées auprès d’autres psychologues cliniciens. Le mot « clinicien » signifie au chevet du patient, c’est-à-dire avec une dimension de soin et de proximité, voire d’intimité. Il est formé à l’écoute individuelle, dans le respect de l’intégrité et de l’unicité de la personne humaine quel que soit son âge et sa situation personnelle.

Il est tenu de respecter le code de déontologie des psychologues (en savoir plus), et le numéro Adeli attribué par l’ARS (l’Agence Régionale de Santé) garantit à ses patients qu’il répond aux exigences de son titre.

Professionnel formé au diagnostic, il dispose d’outils spécifiques.

La profession de psychologue clinicien a hérité de la médecine un objectif diagnostique qui permet l’orientation des personnes vers des professionnels adaptés à leur situation, mais aussi une pratique à visée de traitement (clinique et thérapeutique) d’un état de souffrance.

Le psychologue clinicien dispose d’outils de compréhension de la psyché dont certains sont réservés à son usage exclusif : ainsi les médecins psychiatres, par exemple n’ont pas la formation permettant d’utiliser certains tests utilisés par les psychologues cliniciens. Par exemple, le psychologue clinicien est en mesure d’établir le bilan psychologique d’une personne, en général à des fins d’orientation de cette personne vers les structures ou les professionnels de la santé les plus adaptés.

Les psychanalystes

Les psychanalystes sont des professionnels organisés et rassemblés sous l’égide de sociétés qui ne sont pas habilitées par l’état, comme le sont au contraire les Universités. En effet, bien que dès son origine et sa théorisation (par le médecin neurologue viennois Sigmund Freud) la psychanalyse soit un savoir doublé d’une technique destinée à soigner des patients atteints de pathologies mentales et à les mener vers la guérison, elle peut aussi être vue comme une discipline de développement personnel. Mais il est très important de considérer que ces spécificités ne s’opposent pas, et que l’on doit considérer, comme l’a écrit Canguilhem, qu’il y a une continuité entre le Normal et le Pathologique, qui nécessite de penser l’aspect psychothérapique comme étant inclus de lui-même.

La multiplicité des écoles et les diverses théories – parfois en partie opposées – qui la sous-tendent, ont rendu la psychanalyse populaire en Europe et dans certaines parties du Monde, comme en Amérique du Sud (et notamment en Argentine), mais aussi controversée sur certains de ses aspects théorico-cliniques, ou encore physiologiques et biologiques notamment suite à l’avènement des neurosciences et de l’imagerie médicale.

La difficulté de valider scientifiquement la psychanalyse

La complexité sous-jacente à la psychanalyse, dont l’objet de travail est « la psyché » (et notamment la conflictualité psychique liée aux désirs inconscients du sujet), ainsi qu’une grande variabilité théorico-clinique, sont à l’origine d’une difficulté (admise par tous et notamment par les psychanalystes eux-mêmes) à la question de sa validation scientifique. On ne peut pas conclure de cette difficulté une invalidation (et ce serait une erreur de le faire), mais il faut admettre que celle-ci a joué et joue toujours en sa défaveur. Toutefois, les psychanalystes, souvent issus, comme Freud, du monde des médecins, ont toujours montré une forte rigueur intellectuelle, et il ne faut pas oublier que tout psychanalyste est forcément passé par – au moins – un divan.

La psychologie clinique tient compte de la psychanalyse

Ceci d’ailleurs permet de comprendre qu’être psychanalyste n’est pas exclusif de la profession de psychologue ou de psychiatre, ce qui est très important. La psychologie clinique, notamment, utilise des notions propres à la psychanalyse, et il serait donc erroné de vouloir catégoriser ces entités en les excluant, bien que ce soit un peu ce que nous faisons dans cet article par souci de clarté.

La psychanalyse en mal de reconnaissance.

En tous cas, la difficulté d’évaluer les résultats cliniques obtenus par l’intermédiaire de l’application personnelle (et/ou institutionnelle) de la psychanalyse explique en partie pourquoi, au moment de la réglementation sur l’obtention du titre de psychothérapeute entre 2010 et 2012, les psychanalystes n’ont pas été d’emblée reconnus comme psychothérapeutes, alors que les psychiatres, puis les psychologues, ont rapidement obtenu ce statut du fait de la reconnaissance officielle de la qualité de leur formation (qui inclut une formation à la recherche clinique appliquant la méthode scientifique).

Il est par ailleurs important de noter que même si l’Etat ne donne pas automatiquement le titre de psychothérapeute aux psychanalystes, les systèmes de formation et de reconnaissance – internes aux sociétés psychanalytiques – qui mènent à l’autorisation d’exercer en tant que psychanalyste sont souvent exigeants et confèrent de ce fait aux psychanalystes de réelles compétences en santé mentale.

Les psychothérapeutes

La profession de psychothérapeute a été réglementée depuis une loi 2010. Il s’agit d’un titre qui peut être obtenu sous conditions par différents professionnels (psychiatres, psychologues, psychanalystes, autres thérapeutes). Un psychothérapeute est donc désormais un professionnel de la santé mentale habilité et reconnu. L’utilisation de ce titre certifie que le professionnel dispose de connaissances suffisantes en psychopathologie et de compétences spécifiques dans au moins une technique psychothérapique. Une remarque : les psychiatres et les psychologues cliniciens sont à peu de choses près d’emblée psychothérapeutes, parce que leur formation initiale valide les conditions légales d’obtention du titre.

Remarquons que la psychanalyse peut être considérée comme une technique psychothérapique, mais au vu de la variété des formations d’analystes et de leur plus ou moins grande exigence, les psychanalystes n’ayant pas déjà un diplôme de psychiatre ou de psychologue ne sont pas directement reconnus en tant que psychothérapeutes. S’ils désirent obtenir ce titre, ils doivent donc passer par une formation complémentaire délivrée par un organisme habilité à délivrer cette accréditation. 

Nuage de mots quel psy choisir ?

Parmi les « psys » lequel choisir ?

Un psychologue est-il psychothérapeute ?

Non, un psychologue au sens large du terme n’est pas forcément psychothérapeute. Tout dépend de sa spécialisation. S’il est psychologue du travail, il devra valider une formation en psychopathologie ainsi que des stages pour devenir psychothérapeute. Par contre, s’il est psychologue clinicien et qu’il est inscrit au registre ADELI, il pourra bénéficier du titre de psychothérapeute sans formation supplémentaire. En effet, la loi de 2010 réglemente le titre de psychothérapeute et l’attribue de plein droit aux psychiatres et aux psychologues cliniciens.